Dispositif 2S2C : comment réussir à mettre tout le monde en colère…

L’annonce  par le ministre de l’Education Nationale de la mise en place d’un dispositif Sport, Santé, Culture, Civisme (2S2C) complémentaire du retour en classe des élèves a été particulièrement mal vécue : par les enseignants de ces champs disciplinaires, mais aussi par les autres acteurs.

Dispositif 2S2C : comment réussir à mettre tout le monde en colère…L’idée initiale des « 2S3C » fait sens et aurait pu apporter localement des solutions. Mais, une fois encore, la verticalité de l’annonce sans aucune considération pour les acteurs concernés, provoque polémique et colère. Et produit finalement l’inverse de l‘effet escompté.

De l’usage de la verticalité au contresens politique

Affirmer dès le 4 mai dans une circulaire ministérielle que les élèves « peuvent se trouver […] en activité grâce à un accueil organisé par les communes dans le cadre du dispositif 2S2C « , alors même que ce dispositif n’est pas de la compétence de l’Etat est forcément surprenant (mais un grand classique dans l’Education nationale). On pourrait parler de pensée magique (ou de prendre ses désirs pour des réalités). C’est méconnaitre non seulement l’attachement des acteurs locaux à leurs prérogatives. Mais aussi et surtout c’est négliger les conditions réelles matérielles, de responsabilité et de complexité auxquelles il faut faire face.

Ce n’est pas une façon de « travailler avec » les partenaires locaux, mais une façon pour l’Etat d’imposer à d’autres ce qu’il n’est pas en mesure de faire lui-même (ou ce qu’il ne veut pas faire lui-même). La méthode est une nouvelle fois déplorable. Et le résultat est forcément au mieux médiocre, au pire contre-productif.

2S2C : un message ressenti comme une provocation envers certains enseignants

De façon générale, tous les enseignants des champs disciplinaires couvrant ceux des  2S2C dans l’Ecole se sont sentis bien seuls dans ces annonces. Celles-ci semblent les écarter de leur coeur de métier et prôner l’externalisation de toute une partie de leurs missions. En particulier les profs d’EPS. Lire : 2S2C et EPS, l’incompréhension inévitable.  Et ce dispositif est installé non seulement de façon temporaire et extraordinaire au mois de juin, mais aussi possiblement de façon plus pérenne à partir de septembre.

Lors du confinement, les professeurs d’EPS se sont pourtant mobilisés, ont fait preuve d’imagination, de mutualisation via des groupes formels ou informels, pour assurer le suivi des élèves et leur proposer des modalités de pratiques physiques adaptées.

Et alors que les équipes cherchaient des solutions pour trouver comment renouer avec l’Ecole dans un cadre sanitaire très contraint,  elles apprennent par les médias la mise en place d’un dispositif visant à favoriser la reprise de pratiques physiques, culturelles et artistiques des élèves… mais sans eux !

On peut comprendre que cela crée de la confusion, de la colère, des questions et de l’inquiétude.

Et pourtant une idée de partenariat qui aurait pu faire sens !

Pour le Sgen-CFDT, ouvrir l’Ecole à des partenaires pour des approches complémentaires est pourtant une bonne idée. En effet, la diversité des acteurs éducatifs hors l’Ecole est un atout pour accrocher la diversité des appétences des élèves. Raccrocher les élèves les plus éloignés de l’Ecole en passant par des dispositifs qui font sens pour eux (sport, culture…) ? C’était forcément pertinent.

Mais pourquoi, une fois encore, ne pas d’abord en discuter avec les acteurs directs ?

Les protocoles sanitaires empêchent l’accueil de tous les élèves, il aurait donc été possible – en concertation !- de trouver localement des organisations pour que tous les élèves puissent pratiquer une activité physique, une activité culturelle ou artistique. Parce que de sont des priorités éducatives.

Il était possible de proposer ces activités  en alternance ou au choix. Qu’elles soient encadrées par leurs enseignants dans l’Ecole, ou à l’extérieur par les personnels des associations. En associant largement les enseignants directement pour identifier qui fait quoi : pratique, découverte,  enseignement, résilience… voire simplement « accueil » des élèves.

Une fois de plus, en voulant « aller vite », le ministre a créé plus de confusion que de solutions. Cela laisse à tous un gout amer. Et finalement cela ne va pas faciliter l’accueil de ces élèves « fragiles »,  dont pourtant chacun sent bien qu’il aurait fallu les accueillir.

La verticalité et l’omniprésence de l’Etat pour organiser chaque détail de la vie de chacun sont ici vécus comme contre exemples absolus de l’efficacité.