Les libertés académiques en question ?

La question des libertés académiques surgit généralement lorsqu'il y a une entrave, des privations de liberté ou des répressions exercées à l’encontre des chercheurs.

La question des libertés académiques surgit généralement lorsqu’il y a une entrave, des privations de liberté ou des répressions exercées à l’encontre des chercheurs comme l’exprime une tribune récente publiée en décembre 2019 de Jérôme Heurtaux (directeur du CEFRES, Prague) et Jakob Vogel (directeur du CMB, Berlin).

Le Directeur du CESR s’est exprimé longuement dans un média local sur la question de la crise au CESR et a justifié son organisation du travail ces derniers mois au nom de la liberté académique.

Cette notion mérite d’être précisée car, si elle s’exprime pleinement sur la nature de l’enseignement et les thématiques de recherche, elle ne s’applique pas au titre des charges et fonctions administratives, comme nous le rappelle encore récemment une réponse du Ministère de l’Enseignement supérieur, de la Recherche et de l’Innovation dans une réponse écrite publiée au Journal officiel du Sénat, le 22 août 2019.

Le principe d’indépendance des enseignants-chercheurs dans l’exercice de leurs fonctions d’enseignement et de leurs activités de recherche a été consacré comme principe fondamental reconnu par les lois de la République.

Dans sa décision n° 83-165 DC du 20 janvier 1984, le Conseil Constitutionnel a ainsi déclaré que « les fonctions d’enseignement et de recherche non seulement permettent mais demandent, dans l’intérêt même du service, que la libre expression et l’indépendance des personnels soient garanties par les dispositions qui leur sont applicables » (cons. 19) et « que, en ce qui concerne les professeurs, (…) la garantie de l’indépendance résulte en outre d’un principe fondamental reconnu par les lois de la République » (cons. 20). Ces principes ont été rappelés dans la décision 93-3225 DC du 28 juillet 1993 (cons. 7).

L’indépendance et la liberté d’expression des enseignants-chercheurs sont reconnues au niveau législatif dans l’art. 58 de la loi n° 84-52 du 26 janvier 1984 sur l’enseignement supérieur, dite loi Savary, codifié en 2000 (art. L. 952-2 du code de l’éducation) : « Les enseignants-chercheurs, les enseignants et les chercheurs jouissent d’une pleine indépendance et d’une entière liberté d’expression dans l’exercice de leurs fonctions d’enseignement et de leurs activités de recherche, sous les réserves que leur imposent, conformément aux traditions universitaires et aux dispositions du présent code, les principes de tolérance et d’objectivité. »

Ces principes concernent l’exercice des missions propres d’enseignement et de recherche que remplissent les enseignants-chercheurs. Ils s’ajoutent aux droits et obligations qui s’attachent aux enseignants-chercheurs en tant que fonctionnaires de l’État et que décrit le statut général. Ils jouissent par exemple de la liberté d’opinion (art. 6 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires) et du droit syndical (art. 8). Ils sont également responsables de l’exécution des tâches qui leur sont confiées et doivent se conformer aux instructions de leur supérieur hiérarchique (art. 28), sans préjudice de leur entière liberté académique, qui s’attache à leurs activités d’enseignement et de recherche.

Dans le cadre de leurs fonctions administratives, les enseignants-chercheurs peuvent être également amenés à exercer des compétences de gestionnaires publics responsables, en tant qu’ordonnateurs, de l’engagement des dépenses et de l’exécution des recettes dans le périmètre de leurs responsabilités. Dans ce cadre, ils sont soumis au contrôle juridictionnel de la Cour de Discipline budgétaire et financière (voir notamment art. L. 312-1 et L. 313-6 du code des juridictions financières).

Pour la CFDT, la liberté académique est donc essentielle pour protéger la recherche afin de la préserver des obscurantismes et chapelles sectaires comme la Conférence des Présidents d’Université l’a rappelé encore récemment après des tentatives multiples d’interdire des débats et conférences dans nos établissements.

Pour la CFDT, la liberté académique va de pair avec la défense de conditions de travail décentes, de ressources suffisantes, d’environnements de travail sûrs et sains, de la confiance, d’une autonomie professionnelle, de la collégialité ou encore d’une formation initiale de haute qualité ainsi que d’un soutien et d’un développement professionnel continu. Et c’est pour cette raison aussi que le Sgen-CFDT s’est exprimé contre les tenure tracks qui, par la précarité des carrières proposées, est une remise en cause indirecte de cette liberté académique.

Pour la CFDT, il ne s’agit pas de galvauder le principe des libertés académiques au nom d’intérêts personnels.