Connaissances et compétences, la Guerre de Troie n’aura pas lieu !

S’il y a une révolution à mener, c’est de réfléchir sans cesse à la cohérence de nos programmes de formation que de la simple juxtaposition de matières pour permettre à la fin d’un cycle d’études que nos étudiants aient acquis des connaissances et  …. des compétences.

L’Université de Tours a mis en place les outils pour permettre d’assurer la vie démocratique ou encore la continuité pédagogique.  Si le processus électoral est suspendu dans notre établissement, nous souhaitons réagir à la publication toute récente d’une candidate au conseil d’administration de l’Université de Tours.

L’article signé de notre éminente collègue, professeure des universités opposant la question de l’acquisition des connaissances à celle de compétences nous laisserait presque indifférent s’il ne s’agissait pas d’une tête de liste au conseil d’administration.

Et voilà, à coup de références scientifiques et d’amalgames grossiers, une vision réductrice des compétences apportées par la qualité et l’exigence académique de nos formations est [encore] sur le devant de la scène.

Comme s’il fallait à chaque fois opposée les deux : les connaissances et les compétences que nous pouvons apporter dans nos formations.

Il ne suffit pas de ressortir une vulgate marxisante pour donner corps à une démonstration. Car évidemment la question des compétences n’est pas anodine, elle renvoie à des approches différentes. Les travaux des sociologues sur le passage des qualifications aux compétences dans le monde du travail sont légions et traitent effectivement de la question de l’individualisation des parcours et de l’atomisation du monde du travail.

Aborder la question des compétences à l’Université est un sujet un peu différent.

Car en effet, un étudiant de master d’histoire qui aura traité de l’affaire Dreyfus à travers la presse conservatrice d’Indre-et-Loire, non seulement il connaîtra tout de la vie de Dreyfus ou d’Emile Zola mais il aura bien acquis des compétences dans l’analyse de situations données, dans le traitement sémiologique des termes employées ou encore au travers ses qualités rédactionnelles. Il en est de même pour un étudiant en 6ème année de médecine, on ne lui demandera pas que de connaître parfaitement l’anatomie de son(sa) voisin(e) mais d’être capable d’analyser une radio du cubitus.

Ainsi, traiter des compétences que les étudiants développent au cours de leur parcours de formation universitaire, ce n’est donc plus s’intéresser uniquement à ce qu’ils ont pu acquérir comme savoirs ou savoir-faire (ce qui est décrit le plus souvent dans les objectifs) mais c’est aussi s’intéresser à ce qu’ils vont pouvoir en faire plus tard, une fois leurs études terminées, dans des situations professionnelles complexes et variées.

Alors, s’il paraît plus facile de réfléchir aux compétences dans certains domaines : en médecine, en droit, en archéologie, en finance internationale, en biochimie, en psychologie clinique, etc. C’est a priori plus compliqué dans d’autres disciplines comme la philosophie, les sciences des religions ou la littérature comparée. Pourtant, dans ces disciplines, les étudiants développent aussi des compétences comme des capacités d’analyse et de synthèse, la créativité, l’argumentation, la rigueur méthodologique, la prise de parole etc. …compétences bien utiles lorsque l’on recherche un emploi ou lorsque l’on passe un concours. [D’ailleurs, ce sujet est abondamment traité à l’ENS-Lyon, on vous renvoie aux travaux de l’Ifé !]

Si les connaissances dites « de base » comme de la théorie, des définitions, l’application de formules restent indispensables, il y a évidemment un lien entre connaissances et compétences car c’est grâce entre autres à des connaissances auxquelles on peut recourir que l’on peut développer des compétences complexes comme la collaboration ou la créativité. Quand on parle de compétences, on parle donc bien sûr de mise en œuvre de connaissances de savoir-faire et de savoir-être dans des situations réelles et souvent complexes.

Ainsi opposer connaissances et compétences, c’est faire fi des apports disciplinaires que nous apportons à nos étudiants pour se plonger dans une situation mortifère et pour sa discipline et pour ses étudiants.

Alors, n’opposons pas les connaissances aux compétences au nom d’une illusion d’un monde magnifié mais ouvrons de nouveaux chemins à nos étudiants car en pratique, ce qui est modifié, c’est simplement la description de nos formations, des programmes proposés qui pourront, dans un cadre européen être plus aisément comparés avec l’offre de formation d’autres institutions dans toute l’Europe.

S’il y a une révolution à mener, c’est de réfléchir sans cesse à la cohérence de nos programmes de formation que de la simple juxtaposition de matières pour permettre à la fin d’un cycle d’études que nos étudiants aient acquis des connaissances et  …. des compétences.

 

Pour finir, on laisse à votre réflexion cette réflexion de Meirieu …

 «  l’acte pédagogique n’est pas une simple juxtaposition d’interventions individuelles, aussi ajustées soient-elles, mais bien une construction, matérielle et symbolique à la fois, de l’École en son principe même : apprendre ensemble grâce à la figure tutélaire du maître qui, tout à la fois, crée du commun et accompagne chacun dans sa singularité «