Qu'il s'agisse de la responsabilité civile, qui concerne la réparation d’un préjudice subi par une victime, ou de la responsabilité pénale lorsqu’une infraction est commise (contravention, délit, crime) dans le cadre de son service, les risques pour un agent restent très faibles mais ....
La responsabilité civile, c’est-à-dire pécuniaire, des personnels de direction, d’encadrements et des enseignants peut-elle être engagée ?
La réponse est non.
En effet, le Code de l’éducation prévoit que lorsque la responsabilité des membres de l’enseignement est engagée à l’occasion d’un fait dommageable commis au préjudice des élèves, la responsabilité de l’État est substituée à celle desdits membres de l’enseignement. En aucun cas il peut être imputé à un agent public de payer une réparation à une victime dans l’exercice de ses fonctions (sauf à supposer une intention volontaire de nuire de l’agent ce qui serait considéré comme une faute détachable du service).
Par ailleurs, les conditions dans lesquelles l’État, une fois condamné, pourrait engager une action à l’encontre de l’auteur des faits – en l’occurrence un de ses agents – pour obtenir le remboursement des indemnités versées ne sont pas réunies dans le cas d’une contamination.
Le ministère de l’éducation nationale vient de confirmer et préciser ces éléments :
- Extrait Fiche responsabilité Covid-19 – MEN – 5 mai 2020
La responsabilité des enseignants ou du chef d’établissement ne pourra être engagée devant le juge civil en cas de contamination d’ un élève.
La responsabilité de l’Etat se substitue dans tous les cas à celles des personnels de direction et des enseignants devant le juge civil lorsque la responsabilité de ces personnels est engagée à raison d’un dommage subi par un élève lorsqu’il est placé sous leur surveillance (article L. 911-4 du code de l’éducation). Ce principe s’applique même dans le cas d’une faute personnelle de l’agent.
Ainsi si une famille engage une action en responsabilité à la suite de la contamination de son enfant afin d’obtenir le versement de dommages et intérêts, c’est L’État qui se substituera aux personnels éventuellement mis en cause.
La responsabilité pénale d’un agent peut-elle être engagée ?
De manière très exceptionnelle, le risque est très faible mais ….
La responsabilité pénale est l’obligation d’un citoyen de répondre des infractions commises et de subir la peine prévue par le texte qui le réprime.
- Extrait Fiche responsabilité Covid-19 – MEN – 5 mai 2020
La mise en cause de la responsabilité pénale d’un chef d’établissement ou d’un enseignant n’est envisageable qu’en cas de manquement grave et délibéré aux consignes sanitaires.
Si des personnels devaient être visés par des plaintes, l’État leur accorderait la protection fonctionnelle, en application du III de l’article 11 de la loi n° 83-634 du 11 juillet 1983 (prise en charge des frais d’avocat, accompagnement de l’agent, soutien public etc.).
En tout état de cause, la mise en cause de la responsabilité pénale des personnels pour mise en danger délibérée de la vie d’autrui (article 223-1 du code pénal) ou manquement à une obligation de prudence ou de sécurité prévue par la loi ou le règlement (article 121-3 du code pénal) ne pourra intervenir qu’en cas :
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- de manquement grave et délibéré aux consignes sanitaires (absence volontaire et répétée de mise en œuvre des mesures d’hygiène, par exemple). Aussi, on peut s’interroger de la portée du document que doivent signer les directeurs de composantes, certifiant que le responsable pédagogique d’un étudiant en stage à contrôler l’application des gestes sanitaires dans l’établissement ou l’entreprise.
- ou d’une faute caractérisée qui expose autrui à un risque d’une particulière gravité dont le personnel avait connaissance.
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De plus, il faudrait encore apporter la preuve que cet acte est réellement et de façon certaine la source d’une contamination. Ce lien là encore est très difficile à établir et donc les condamnations sont improbables.
« Il m’apparaît que la seule protection contre d’éventuelles poursuites est de rester calme et serein, de respecter strictement les obligations sanitaires et de sécurité (obligation de moyen) et surtout, en cas de difficultés ou d’insuffisance des mesures mises en place pour garantir la sécurité des élèves, d’alerter immédiatement la hiérarchie et, en dernier recours, de suspendre les cours.”
Maitre Laurent Hazan Avocat à la Cour, spécialisé dans la protection fonctionnelle des enseignants
le 27 avril 2020
Pour le Sgen-CFDT, il est essentiel de sortir du tourbillon médiatique comme de la pression de certains supérieurs hiérarchiques. Pour agir comme agent public de manière éthique et responsable, dans une situation professionnelle inédite et parfois angoissante, il convient d’avoir une juste appréciation.
Aujourd’hui le risque sanitaire est bien supérieur au risque pénal, qui reste extrêmement faible pour ne pas dire davantage mais il reste quand même la responsabilité morale.